Sur le banc de l'église Saint-Paul, archicomble dimanche à 11 heures pour la messe des Rameaux, un homme ressent le besoin de partager une émotion forte avec une totale inconnue. « J'habitais Paris mais depuis que je suis dans le Nord, je n'entends presque plus ma liturgie... Pour les Rameaux, les enfants défilent en procession, habillés comme des princes et des petites princesses. Et j'étais l'un d'eux, il y a longtemps. » Patricia Duval, présidente des Amis d'Antélias Liban, un jumelage entre la paroisse Jean-XXIII de Marcq et Sainte-Élise d'Antélias, au nord de Beyrouth, a les mêmes souvenirs. « Là-bas, les Rameaux, c'est de la folie, 4 000 personnes, on est à court d'hosties... Toute la période qui précède Pâques est un tourbillon. On nous achète des habits neufs exprès et, dans mes albums de famille, il y a davantage de photos prises aux Rameaux qu'à Noël. » L'association est à l'origine de la venue dimanche de Monseigneur Maroun Nasser Gemayel, évêque des maronites de France depuis le 21 juillet 2012. Il est de la même génération que Mgr Ulrich, évêque de Lille : « Nous avons été des copains de classe à Lyon entre 1975 et 1977 ; j'ai assisté à son ordination », a-t-il expliqué dans son homélie. « Les gens avaient envie d'avoir un prêtre pour fêter les Rameaux, et nous avons eu deux évêques, quel cadeau ! », plaisante Patricia Duval.
Les Amis d'Antélias Liban comptent un noyau dur d'une cinquantaine de personnes qui proposent des cours d'arabe, des heures du conte pour les enfants, des voyages au Liban... Tout ce qui peut tisser des liens entre les deux cultures. « L'association est née de la réalité de la paroisse : des familles libanaises ou franco-libanaises, qui prient et appellent là-bas lorsqu'il y a des problèmes politiques. » Et se serrent les coudes de ce côté de la Méditerranée (lire ci-dessous).
« Les gens ne remarquent pas que nous sommes Libanais, nous disent qu'on n'a pas "le look" », explique Patricia Duval. Et si les maronites de Marcq et des environs ressentent le besoin de se rapprocher, c'est parce que dans leur pays, il n'est pas toujours facile d'être chrétien.
L'homélie de Mgr Gemayel, rappelant une amitié franco-libanaise datant de saint Louis, les travaux des Français sur les évêques syriaques... semble presque dire que c'était mieux avant. « Oui, nous avons des problèmes : une persécution plus ou moins tacite, plus ou moins affichée, nous a-t-il précisé. Il vaut mieux être musulman quand on est un jeune diplômé qui cherche du travail. » Tout en insistant sur les nombreux points communs entre christianisme et islam.
Mgr Ulrich a souligné l'intérêt pour les paroissiens « ordinaires » de découvrir le rite maronite. Les chants du soliste, les psalmodies de Mgr Gemayel avaient lieu en syro-araméen, une langue proche de celle parlée par le Christ - et qui, aux oreilles profanes, ressemble à l'arabe. Preuve que l'Orient a accouché de tous les monothéismes et que rien n'y est figé.